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Sa philosophie de création

(Dans Cinéma cinéaste - Notes sur l’image écrite)

« Il est difficile, il serait presque méritoire de demeurer libre de sa création et de vouloir poursuivre et accomplir sa démarche, de pouvoir conserver le cap de sa cohérence éthique, de résister. Et le champ de la création est de plus en plus fermé aux générations nouvelles : elles ne peuvent aborder la création que dans le carcan d’une mise en condition, celle d’une homogénéisation de la pensée, « dressage » qui ne dit pas son nom et qui permet à l’élève de s’identifier au maître. De modes et des modèles sont offerts, exaltés, exemplarités, sans autre alternative. À ce jeu Pervers, les média se prêtent complaisamment, sans prise de distance critique, sans révolte et sans remous.

« Mes films sont invariablement documentaires. Je ne mets pas mes acteurs en scène, ils deviennent structure documentaire ».

« C’est le trajet seul qui importe. Le chemin du film n’est pas sentir battu, il est insoupçonnable, imprévisible, inconnu, il se découvre et s’explore, caminando*. Le film n’a pas de modèle. »  *(En marchant)

« Filmer, cela ne peut être d’un œil froid, cela ne peut se faire qu’à travers un regard amoureux, le regard innocent que l’autre porte à celui qui filme pour lui dire : “ Je sais que tu ne me regardes pas juste pour me regarder, mais pour te reconnaître et te comprendre en moi ” ».

 

ALTERITE

  • «  le paradoxe du cinéaste, du créateur en général,n’est pas de dévoiler, d’étaler une apparente réalité déjà connue de celui qui, spectateur à son tour, regarderait cette apparente réalité sans surprise ni étonnement, déjà dans l’attente de ce qui lui est proposé.

    Le nécessaire et utile paradoxe du cinéaste est de connaître l’inconnaissable, de pénétrer en premier un monde éloigné, qui lui serait totalement étranger, de l’explorer et de le découvrir en une virtuelle concomitance avec le spectateur, jusqu’à la conscience partagée d’une réalité connue de tous et de toujours, à la fois évidente et surprenante.

    Toujours se laisser surprendre par le film et le surprendre, comme la vie ne cesse de surprendre la mort, à toujours la différer. »

 

  • « La caméra ne s’implique pas toujours dans la procédure du film et ce n’est qu’à transgresser de règles établies que la prise de vue peut tendre à être réelle et signifiante, sans avoir à se soumettre à une Psychologie narrative de l’image, celle qui fait la routine du cinéma. »

 

  • « Quelles images resteraient un jour présentes à notre mémoire, sinon les images qui auraient été créées au présent, à la conscience présente de nous-mêmes, de nous-mêmes face au monde, face à la société, aux autres, à l’histoire à notre histoire. Face à notre responsabilité de cinéastes, celle de fabriquer des images et des sons, de faire du vrai avec du faux. »

 

  • « L’extrême nécessite du zoom, de tout mouvement de caméra, n’est évidente qu’à être d’abord  pulsion de notre regard. Le mouvement n’advient qu’à être prévisualisation de notre désir, à mettre en acte et exercer le virtuel désir du spectateur. »

 

  • « Être responsable, maître de ses images,  entièrement, juste laisser apparaître, libre, l’interstice du hasard, laisser juste apparent le chas de l’aiguille que va enfiler le fil qui va coudre le film. »

 

  • « le scénario du film ne saurait être déroulement linéaire – il est convergence, concentration, chaos, éclatement d’un temps expansé, raccourci, condensé-il est l’échange fulgurant d’une pensée et d’un regard dans un espace aboli. »

 

 

(Dans Entretien avec M.H.- L’acte cinématographique, Ecran, N°78, mars 1979 Marcel Martin)

« Je suis conscient d’effectuer une recherche cohérente qui porte sur l’outil-caméra, sur l’usage de cet outil, sur ce que filmer veut dire, sur le langage cinématographique, sur ce que l’écriture filmique peut avoir de spécifique (…) L’usage de la caméra ne saurait porter sur la pratique d’un axe unique, que j’appellerai d’axe de représentation. »

 

 

(Dans M.H. L’Insoutenable Regard de la Caméra)

« Ce qui fait et fera le film c’est la mise hors champs et off, la disparition de toutes ses structures d’apparences, lettéraires et narratives pour ne faire place qu’à une écriture cinématographique réelle et spécifique, sonnant comme des notes détachées et liées, donnant à regarder un film structuré comme du langage. »

 

 

(Lettre à un jeune cinéaste – 1977)

« Tu as choisi de t’exprimer par le son et l’image, tu as choisi un acte essentiellement révolutionnaire et politique, la création cinématographique. Prends garde de ne pas être détourné par les plus paradoxales et les plus fallacieuses raisons. Préserve ton indépendance ; elle est aussi celle du spectateur, elle est « réciproque ». (…) Il n’est pas de bon sujet, il n’est pas de bon projet. Ton film est objet cinématographique dont le spectateur et seul le spectateur sera sujet, le principal.(…) En ayant choisi le dur désir d’être cinéaste, sache que ce désir est fragile et que toutes les Sirènes, tous les mirages des institutions cinématographiques s’emploieront avec force à t’en distraire et à t’en détourner. Dans ce combat qui t’attend, sache être le moins soumis ». 

 

 

UN REGARD POETIQUE

 

 (Dans Cinéma cinéaste - Notes sur l’image écrite)

  •  « Les mots, les images –ma nourriture, ma mort-, au fur et à mesure m’inventent. Ils sont l’esprit de notre corps. »
  • « L’événement n’est pas au centre de l’image, il est à sa périphérie, dans une zone utopique et intemporelle, intérieure à nous-mêmes qui regardons le film. »
  • « Le silence d’une image est encore une image, peut-être la plus belle ? ».
  • « L’image ne peut être qu’envol, verticalité, hauteur, ascendance, elle doit être un arrachement à l’horizontalité tranquille de la narration ».
  • « Il est un chemin du cinéma très court, que peu osent prendre car ils ne savent pas
     qu’au-delà le chemin ne s’arrête pas ».
  • « L’image ne fournit pas une identité à celui qui la regarde. Elle ne lui dit pas : « Tu es ! » Elle devrait dire : « qui sui-je ? »
  • «La beauté de l’image cinématographique s’envole s’élève et survole la mort. 
  • « Calligraphier les images jusqu’à ce que le sens apparaisse au-delà  du signe et qu’alors le signe n’ait plus d’autre signification que lui-même. »
    « L’image n’est pas miroir et reflet, elle contrechamp, le champ principal restant toujours le spectateur  (unique), que certains nomment dérisoirement et abusivement le public. »
  • « Entre l’abîme des mots et celui des images, le film se déroule, au bord de la chute »
  • « Économie du film : juste par le geste vide, avoir un contenu de geste ».
  • « Le film n’est pas le constat d’un rêve, il est un rêve à venir dans lequel nous entrerons. »
  • « Attraper les images, les mots, les assembler, les disperser, les faire s’envoler au niveau du sens, les laisser planer très haut, lentement nous survoler, nous observer tandis que nous les regardons, que notre vision se fait regard et s’envole vers le mots, les images. »
  • « Ecouter, juste écouter, ceux, ce que je filme et filmerai jusqu’à la fin  du temps et du sens de filmer. Les images me quitteront, se sépareront de moi, s’en iront loin, m’attendre, m’attendre, m’attendre déjà. »  

 

SA VISION  SOCIOPOLITIQUE

(Dans Cinéma cinéaste - Notes sur l’image écrite)

« L’absence  de moyens de film, et cependant filmer, est une richesse qui est la pauvreté  même du cinéma riche. »

« Tout film est politique, devrait être expérimental et ne devrait pas avoir à revendiquer d’être une exception culturelle ».

 

(Dans La Création est un cri politique)

« La mise en circulation, la diffusion de toutes nouvelles créations audiovisuelles est un droit, elle ne peut être qu’un pari, le pari que l’œuvre parte à la découverte d’un public nouveau, inconnu, qui reconnaisse à son tour une œuvre nouvelle, différente, non répétitive, inattendue. »

 

« La création, acte de citoyen, acte politique constant, ne se proclame pas au sortir d’un désert, au détour du silence. La rupture du silence n’est pas intermittence de la creation. Le fracas du cri médiatiique ne peut être interruption de l’œuvre, mais sa continuité.
La création - au travail- est en soi un cri de non obéissance. »

 

 

SON STYLE

(Dans « entretien avec M.H. » image et son, n°265, novembre, 1972)

  • Le montage comme travail d’épuration

    « C’est une direction vers une épuration, c’est pour moi aller vers la possibilité de dire un maximum de choses avec un minimum de moyens, étant entendu qu’au départ, le cinéma offre des moyens extrêmement variés, extrêmement tentateurs disons, c'est-à-dire qu’il est extrêmement facile pour un profane même d’utiliser les moyens du cinéma tel qu’ils offrent dans leur multitude, dans leur variété, mais je crois que ce qu’il fau pourvoir et savoir-faire, c’est refuser l’emploi anarchique de tous ces moyens, et donc essayer de leur donner une rigueur en les épurant et en extrayant l’essentiel par rapport à l’expression voulue. Je pense que souvent les moyens investis dans un film dépassent l’idée de départ qui n’est plus alors maîtrisée. »

 

  • Science du montage
    (Inspiré  du modèle musical de la fugue)

    « J’ai envie de contourner l’image, de la reprendre, de contourner les mots, de les reprendre, pour trouver ce qui n’est pas donné d’emblée. Il y a au moins une volonté d’approcher le vrai. Le mot espagnol acercamiento me semble le plus juste, il est comme l’expression, l’extension d’un travelling qui se fait langue préhensible. »